Le tri et le mélange de timbres dans les traités d'orchestration: une approche tensive

Défini habituellement comme étant le résultat des sur-harmoniques d’un événement sonore quelconque, le timbre (la couleur du son) a été étudié par plusieurs champs, parmi lesquels l’acoustique et la musicologie. Dans les cadre de chaque domaine d’études d’ innombrables analyses ont cherché à segmenter le timbre dans une sorte de morphologie temporelle interne. Considérés aujourd’hui indubitablement comme étant des innovateurs, des travaux comme « Traité des objets musicaux », de Pierre Schaeffer (1966) et « Die Lehre von den Tonempfindungen als physiologische Gründe für die Theorie der Musik », de Hermann von Helmholtz (1863) ont contribué à la consolidation de cette approche morphologique. Malgré les notables découvertes achevées par ces recherches, cette approche montre ses limites quand il s’agit de comprendre les effets de sens produits par le timbre. À cet égard, notre travail se propose de complémenter l’analyse morphologique de la constitution interne du timbre par une analyse sémiotique de nature syntaxique (Greimas & Courtés 1979), plus spécifiquement en termes de tri et de mélange (Greimas 1983, Bastide 1987, Fontanille&Zilberberg 2001, Zilberberg 2004). Notre argumentation se concentrera sur les avantages d’une description sémiotique capable aussi d’expliquer les contraintes structurelles sous-jacentes à la sélection et à la combinaison de timbres dans la production du sens dans les textes musicaux, soit dans la musique savante, soit dans la chanson de consommation. A cet effet, on analysera la tendance de certains timbres à se mélanger ou à se trier mutuellement, tel que témoigné par l’histoire de l’orchestration (Carse 1964; Harnoncourt 1982) à l’aide des différents étages de la syntaxe extensive formulés par le sémioticien Claude Zilberberg (2004), c’est-à-dire: fusion, brassage, contiguïté et séparation. L’approche que nous proposons peut par exemple expliquer la raison pour laquelle certains timbres sont employés plus fréquemment dans le rôle de la mélodie soliste, tandis que d’autres ont tendance à n’être utilisés que lorsqu’ils sont mélangés dans les fusions sonores et dans les homophonies. Ensuite, on montrera comment le mécanisme de sélection et combinaison du timbre retrouve des systèmes semblables opérants dans les langues naturelles, aussi bien que dans d’autres langages non verbaux. Dans les langues naturelles, le domaine de la phonotactique offre plusieurs exemples de contraintes syntaxiques qui opèrent exclusivement sur le plan de l’expression. Dans le domaine sémantique, le phénomène connu en anglais comme « collocations » démontre comment certaines combinaisons lexématiques sont préférées tandis que d’autres sont plutôt refusées. Dans les langages non verbaux, un phénomène pareil peut être retrouvé dans plusieurs théories de la couleur, dont le meilleur exemple est la Farbenlehre, de J. W. Goethe. Au-delà de leurs particularités, tous ces cas suivent les mêmes principes sémiotiques qui règlent régissent aussi la sélection et la combinaison des timbres dans le discours orchestral et instrumental. Les résultats de notre analyse attestent la validité d’un intervalle de timbres de la même façon que l’on retrouve dans le cas de la hauteur. Enfin, on ne doit pas oublier que ces dégrés de compatibilité et d’incompatibilité entre timbres ne résultent pas d’une matérialité acoustique à priori. Bien au contraire, ils résultent de la mise en discours par la praxis énonciative (Fontanille 2004, Bertrand 2000) et des normes esthétiques courantes dans chaque contexte socioculturel et historique.
País: 
Brasil
Temas y ejes de trabajo: 
Los pasajes y articulaciones entre semióticas verbales y no verbales
Las semióticas de las artes: momentos y territorios
Institución: 
Universidade de São Paulo
Mail: 
lucas.shimoda@usp.br

Estado del abstract

Estado del abstract: 
Accepted
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